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Transphobie au travail – Le guide 2024

    transphobie au travail - le guide pour tout comprendre. Bureau avec quatre collègue qui travaillent.

    Tout sur la Transphobie au travail

    44% des personnes trans affirment avoir subi de la discrimination à l’embauche. C’est presque une personne sur deux… Ce chiffre ahurissant laisse transparaître à quel point la transphobie au travail est présente dans quasiment tous les milieux professionnels. Comme elle représente un énorme frein pour l’épanouissement des personnes trans, nous avons décidé de faire le tour de la question dans cet article pour t’aider à la comprendre et à mettre en place des actions concrètes pour y mettre fin dans ton travail.

    La transphobie c’est quoi ?

    Déjà la transphobie c’est quoi ? Ce terme s’il est assez ancien, n’est rentré que récemment dans l’espace public et médiatique. Inutile de décrire la panique morale qui a été associé à ce terme et les réalités qui l’accompagne. On va donc commencer par un focus sur le sujet pour clarifier tout ça.

    Qu’est ce que la transidentité ?

    La transidentité fait référence aux personnes dont l’identité de genre ne correspond pas au sexe qui leur a été attribué à la naissance. Il remet en question la compréhension binaire conventionnelle du genre, en reconnaissant un spectre d’identités. Ce terme générique inclut les personnes transgenres, non binaires, genderfluid, etc.

    Un homme trans c’est une personne qui a été assigné femme à la naissance et dont l’identité de genre est homme.

    Une femme trans c’est une personne qui a été assigné homme à la naissance et dont l’identité de genre est femme.

    Par contre, les personnes non-binaires, elles, ne se reconnaissent ni dans le genre homme, ni dans le genre femme.

    Le mécanisme de la transphobie

    Cis c’est le pendant de trans. On parle d’une personne cis quand cette personne a une identité de genre qui aligné avec le sexe qu’on lui a assigné à la naissance. Par exemple, une personne qui a été assigné homme à la naissance et dont l’identité de genre est homme. Dans notre société être cis est la norme.

    Or, toute transgression de cette norme de genre est condamnée. Cela se retrouve énormément dans notre langage et notamment dans les insultes qu’on utilise. Pour ne pas donner des exemples plus vulgaires, on peut par exemple parler du terme “femmelette”, pour un homme qui aurait un comportement jugé trop féminin, ou de “garçon manqué” pour une femme qui aurait un comportement jugé trop masculin.

    Les personnes trans rentrent par définition dans une transgression des normes de genre. Elles sont donc perçus comme anormales voire “bizarre”. Cela justifie la création de discours et des actes violents concernant la transidentité et les personnes trans. Elles sont considérés par les plus extrémistes comme des dangers pour les “valeurs traditionnelles de la famille”. Ces discours ont notamment été utilisés pour construire un arsenal juridique et administratif qui pénalise les personnes trans. C’est dans cette démarche que la transidentité a été considéré comme une maladie mentale jusqu’en 2010. Encore aujourd’hui elles doivent affronter des démarches complexes pour être reconnue.

    Les chiffres de la transphobie

    Si nous n’avons pas accès a beaucoup de données en France, aux États-Unis une étude de 2015 qui a réuni 27 715 répondant·es a montré que :

    • Près de la moitié (46 %) des personnes interrogées ont été harcelées verbalement au cours de l’année écoulée parce qu’elles étaient transgenres.
    • Près d’une personne interrogée sur dix (9 %) a été agressée physiquement au cours de l’année écoulée parce qu’elle était transgenre.
    • Près de la moitié (47 %) des répondant·es ont été agressé·es sexuellement à un moment donné de leur vie et une sur dix (10 %) a été agressé sexuellement au cours de la dernière année.
    • 72 % des personnes interrogées ont déjà travaillé dans le domaine du sexe.
    • 65 % des personnes interrogées ont déjà été sans abri.
    • Plus de la moitié (54 %) ont subi une forme de violence conjugale, y compris des actes impliquant un contrôle coercitif et des violences physiques.

    Pourquoi retrouve-t-on de la transphobie au travail

    Comme notre société est cisnormative (c’est à dire qu’être cis y est une norme), la transphobie est présente dans toutes ses sphères. Le travail n’est donc bien évidemment pas épargné.

    Le problème, c’est que la possibilité d’avoir accès au travail et de pouvoir s’y épanouir est plus qu’importe pour être pleinement intégré dans notre société. Il est donc du devoir de toutes les organisations de rendre leur environnement professionnel inclusif pour les personnes trans.

    La transphobie ordinaire au travail

    Si nous avons pu voir l’étendue des violences que vivent les personnes trans, la transphobie au travail se caractérise d’abord dans beaucoup d’interactions du quotidien. Si une mauvaise expérience peut être acceptée, la répétition toutes la journée de ces micro-agressions a un impact lourd sur la santé mentale des personnes trans.

    Le mégenrage

    Mégenrer quelqu’un, c’est l’appeler avec un pronom qui ne correspond pas à son identité de genre. Par exemple, parler d’une femme en utilisant le pronom il. Si cela peut paraître anodin, les personnes trans sont confrontées quotidiennement à cette remise en cause de leur identité. Cela affecte leur santé mentale. Au travail, il est donc important de demander les pronoms de ses collaborateur·ices et de faire attention à bien utiliser les bons pronoms.

    La reconnaissance administrative

    Il est possible pour les organisations de reconnaître administrativement le genre des personnes transgenre dans une certaine mesure. La méthode la plus simple est d’utiliser leur prénom d’usage et leur pronom de la personne sur tous les documents administratifs y compris les bulletins de salaire, ou supports (messageries électroniques, annuaires internes, intraweb etc.), ce, peu importe l’état civil de la personne. C’est même une recommandation du défenseur des droits dans sa décision cadre n°2020-136.

    Les questions intrusives

    Au quotidien, les personnes trans et identifiées comme telles, reçoivent de nombreuses questions intrusives et personnelles. Par exemple : “Est-ce que tu as fais une opération chirurgicale ?”, “quand as-tu fais ta transition ?”, “quelles toilettes utilises-tu ?”.

    Si elles sont le plus souvent motivées par la curiosité, elles restent néanmoins déplacées. De plus, il faut être conscient·e que si chaque personne qui pose ces questions ne les posent qu’une fois, les personnes transgenres les entendent en boucle semaine après semaine. Elles affectent leurs santés mentales et leurs confiance en-elle et participent à remettre en cause leurs identités.

    L’Accueil des transitions

    Il est possible que des personnes effectuent leur transition de genre alors qu’elles sont déjà salariés de l’entreprise. Dans ce cas, elles vont le plus souvent en parler avec leurs responsables. L’employeur doit alors absolument savoir accueillir sa parole au risque de rompre tout dialogue par des moqueries ou l’absence de prise en compte de sa transidentité. L’absence de dialogue va nécessairement remettre en cause le bien-être au travail de la personne trans.

    Une fois le dialogue établi, il faut mettre en place des aménagements adaptées en fonction des besoins exprimés par le·la salarié·e. On pense notamment à des arrêts de travail suite à une intervention chirurgicale, à des modifications administratives ou à l’usage des espaces non mixtes (vestiaires, toilettes) etc. Malheureusement, cette prise en compte n’existe pas dans la plupart des espaces professionnels.

    Les violences transphobes au travail

    En plus de ces manifestations ordinaires, la transphobie au travail peut prendre des formes très violentes. Ces violences sont condamnées par la loi mais persiste malgré tout. Il est de la responsabilité de l’employeur de les prévenir et de les traiter lorsqu’elles se produisent.

    L’outing

    Une des violences transphobes récurrentes est l’outing. Elle consiste à révéler la transidentité d’une personne sans son consentement. Cette pratique illégale est une violation de la vie privé. De plus, elle expose la personne concernée à d’éventuelles violences de la part des personnes qui on reçu l’information.

    Les remarques transphobes

    Ces violences se caractérisent par des remarques qui peuvent aller de la plus anodine jusqu’aux insultes. Elles véhiculent des moqueries, la remise en cause de l’identité voire une haine des personnes transgenres. Ces remarques et insultes peuvent témoigner soit d’un manque de connaissance de la transidentité soit d’une haine plus ancrée. Cette haine est assez répandu dans la société du fait du manque de sensibilisation sur le sujet et de l’omniprésence de la binarité de genre.

    Inutile de préciser qu’elles ont des conséquences très néfastes sur les personnes qui les reçoivent. En effet, elles peuvent leur donner un sentiment d’insécurité au travail qui peut amener à des isolements, des démissions ou des burn-out dans les cas les moins graves.

    Le harcèlement transphobe

    Le travail est également un milieu propice pour les phénomène du harcèlement transphobe. On peut parler de harcèlement transphobe lorsqu’il y a une répétition d’actes transphobes sur une même personne au sein d’un groupe donné. Il s’agit de harcèlement autant lorsque ces actes sont commis par une seule personne que lorsqu’ils sont commis par des personnes différentes.

    Les violences physiques

    La transphobie au travail peut même dépasser le cadre des violences verbales. Ainsi, de nombreuses personnes trans sont agressées physiquement du fait de leur identité de genre. Ces violences peuvent intervenir en marge du lieu de travail ou lors d’événements d’entreprise. Ils peuvent également être engendré par une situation d’harcèlement. Selon les travaux d’Arnaud Alessandra et de Karine Espineira 85% des personnes transgenres subissent de telles agressions au cours de leurs vies.

    Lutter contre la transphobie au travail

    Lutter contre la transphobie au travail est essentiel pour promouvoir un environnement de travail équitable, respectueux et productif. Pour participer à cette dynamique, plusieurs actions sont incontournables.

    Former ses équipes pour lutter contre la transphobie au travail

    La première et sûrement la plus importante consiste en la formation des équipes à l’accueil de personnes transgenres. Ces formations ont un double intérêt :

    1 . Comme la transphobie est le plus souvent lié à un manque de connaissance, elles permettent à tout le monde de comprendre les enjeux et leurs responsabilités pour y faire face.

    2. Elles permettent aux équipes encadrantes d’acquérir les outils pour prévenir la transphobie et savoir réagir lorsqu’elle se manifeste.

    D’ailleurs, si vous souhaitez former vos équipes pour lutter contre la transphobie dans votre boîte, rendez vous ici.

    Encourager la représentation des personnes trans

    Pour lutter contre la transphobie au travail, il est très important que des personnes transgenres soient représentés dans l’organisation et notamment dans les postes de directions et d’encadrements. Cela permet d’une part de normaliser la transidentité et donc de la rendre plus acceptable. D’autre part, les personnes transgenres pourront avoir le sentiment de

    Plus important encore, avoir des personnes trans représentées dans les prises de décisions importantes va permettre d’avoir l’œil de personnes concernées par la transphobie sur ces décisions. Ainsi, cela peut prévenir certaines décisions transphobes.

    Prévenir et traiter les violences transphobes

    On en parlait précédemment dans l’article, la transphobie au travail se traduit souvent par des violences. Pour rendre votre entreprise inclusive pour les personnes trans, il est impératif de les prendre en compte pleinement et d’agir concrètement pour y faire face.

    Il s’agit d’une part de prévenir ces violences en les mesurant et en mettant en place des actions de sensibilisation adaptées.

    Il s’agit également d’avoir un protocole de signalement et de traitement des violences transphobes qui soit connu de tous et sécurisé pour traiter rigoureusement tout signalement de violence.

    Le recrutement des personnes trans

    La transphobie au travail commence avant même que des personnes trans soient salariés de votre organisation. En effet, elle peut apparaître dès le recrutement. En ne prenant pas cela en compte, l’entreprise participe à l’exclusion des personnes transgenres du marché du travail.

    Les discriminations à l’embauche des personnes trans

    En effet, on le disait en introduction, près d’une personne trans sur deux a déjà vécu des discriminations à l’embauche. De plus, Pour 8 recruteurs sur 10, la transidentité est un « obstacle à l’embauche » en France. Ces discriminations sont particulièrement problématiques puisqu’elles empêchent les personnes trans d’accéder au pouvoir économique. C’est une des raisons de la précarité de beaucoup de personnes transgenres.

    Faire des fiches de postes inclusives

    Pour rendre vos fiches de postes plus attractives pour les personnes trans, vous pouvez commencer par utiliser un langage inclusif en adoptant le point médian et en privilégiant des termes épicènes. Il est également important de mettre en avant votre engagement contre la transphobie et les actions que vous mettez en place. Enfin, gardez une flexibilité dans vos exigences. les minorités de genre ont tendance à se sentir moins légitime pour postuler à des postes pour lesquelles elles n’ont pas toutes les compétences exigées.

    Pourquoi vous avez intérêt à lutter contre la transphobie au travail

    En plus des raisons évidentes de luttes contre les discriminations, il est intéressant pour les entreprises de lutter contre la transphobie a différents niveaux.

    Limiter les risques

    Ne pas prendre au sérieux la lutte contre la transphobie au travail peut créer des risques à l’entreprise à différents niveaux :

    1) Le risque juridique

    Ton employeur a l’obligation d’assurer la sécurité de ses équipes et par sécurité on entend autant physique que mentale. Il est légalement responsable de la prévention, la prise en charge et la sanction de tout types de violences transphobe.

    2) Le risque financier

    Alors oui, l’employeur risque une amende pour manquement à son devoir de protection. Mais il faut savoir que les violences transphobes peuvent avoir également un impact sur les finances de l’organisation :

    • Il faut remplacer les personnes en arrêt maladie. Cela engendre un coût salarial mais aussi en terme de temps dédié au recrutement par exemple.
    • Il faut anticiper les potentielles indemnités à verser à la victime même après un licenciement.

    3) Le risque de perte de performance

    Les personnes victimes de violences sexistes au travail vont adopter des stratégies d’évitement face aux micro agressions du quotidien.

    Par exemple, une personne trans qui va régulièrement recevoir des remarques transphobes lors de rendez-vous clients, peut être amenée à éviter ces rendez-vous et donc à limiter une partie de ses missions.

    4) Le risque de réputation

    Aujourd’hui, les employé·es sont très attentifs aux engagements des entreprises lorsqu’iels doivent faire des choix. En effet, 84 % des candidat·es considèrent l’inclusion comme un critère déterminant dans le choix de leur entreprise.

    Le témoignage d’un·e  ou plusieurs salarié·es qui ont vécu de la transphobie dans l’entreprise peut nuire grandement à la marque employeur. 

    Attirer des talents

    Il y a des talents parmi les personnes transgenres qui représentent une part importante de la population. En effet, selon un sondage réalisé par YouGov pour l’Obs, 14 % des 18-44 ans ne se retrouvent pas complètement dans la dichotomie homme/femme. Ne rien mettre en place pour lutter contre la transphobie au travail va vous empêcher de les attirer et de les fidéliser.